Sur Mars, Curiosity a détecté avec ChemCam de l’oxyde de manganèse. La formation de ce composé chimique requiert plus d’oxygène que l’oxyde de fer qui recouvre la Planète rouge et lui donne son teint caractéristique. Les planétologues estiment donc que l’atmosphère de Mars possédait beaucoup plus d'oxygène dans le passé qu’aujourd’hui.

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    Enveloppée d'une atmosphèreatmosphère plus dense, il y a environ 4 milliards d'années, Mars, encore jeune, était un monde plus chaud et humide, aux airs de planète bleue. Puis, lentement, son destin a basculé et elle s'est mise à rougir. Un teint devenu emblématique qui, depuis plus de deux millénaires, lui vaut d'être nommée en l'honneur d'anciennes divinités tantôt de la Guerre (Nirgal à Babylone, Arès en Grèce, Mars à Rome), tantôt du Feu (Vahram en Perse), voire du Soleil (Horus en Égypte). D'ailleurs, pour Pline l'ancienPline l'ancien, sa couleur s'explique par sa proximité avec le Soleil...

    En réalité, on sait aujourd'hui que ce fard déposé progressivement n'est autre que de la rouille, de l'oxyde ferfer. Mais comme il n'y a plus que des traces résiduelles d'oxygèneoxygène (0,13 %) dans son atmosphère essentiellement composée de dioxyde de carbonedioxyde de carbone (95 %) et d'une pincée d'argonargon (1,5 %) et de diazote (3 %), le rayonnement ultravioletultraviolet du Soleil qui a cassé les moléculesmolécules d'eau évaporée, est désigné comme principal responsable de cette oxydationoxydation commencée il y a plusieurs milliards d'années. Un long processus qui a accompagné l'érosion de son atmosphère...

    Néanmoins, les scientifiques sont nombreux à penser que les proportions de cet élément devenu très rare étaient plus élevées dans le passé. Comme nous allons le voir, de récentes observations faites par Curiosity semblent leur donner raison.

    Sur Mars, il n’y a pas que le fer qui est oxydé, le manganèse aussi

    Venue présentée, à l'occasion des rencontres de l'Union géophysique européenne qui se déroulaient la semaine dernière à Vienne, trois années d'investigations du laserlaser ChemCamChemCam (plus de 300.000 tirs) qui équipe le roverrover américain débarqué sur Mars, dans le cratère Gale début août 2012, la planétologue Agnès Cousin, de l'Irap (Institut de recherche en astrophysiqueastrophysique et planétologie), à Toulouse, et son équipe, a signalé la découverte d'oxyde de manganèsemanganèse dans des roches de la région qu'il explore, sur les premiers contrefortscontreforts du mont Sharp.

    Deux échantillons de roches riches en oxyde de manganèse observé avec la ChemCam de Curiosity. © Nasa, JPL-Caltech

    Deux échantillons de roches riches en oxyde de manganèse observé avec la ChemCam de Curiosity. © Nasa, JPL-Caltech

    « Nous avons trouvé que 3 % des roches ont une haute teneur en oxyde de manganèse », a-t-elle déclaré à l'assemblée, comme le rapporte le magazine New Scientist qui a pu assister à sa présentation. « Cela requiert beaucoup d'eau et des conditions fortement oxydantes, donc l'atmosphère pouvait contenir beaucoup plus d'oxygène que nous ne le pensions », a-t-elle ajouté.

    Pour les chercheurs, du fait que ces roches sont dans la région d'un ancien lac, l'eau a sans doute joué un rôle dans cette oxydation. « C'est une possibilité. » Pour l'instant, ils n'ont pas encore pu déterminer l'âge de ces traces, mais ils comptent sur de prochaines occasions pour pouvoir le faire.

    De l'oxygène mauvais pour la vie ou produit par la vie ?

    Précisons que de plus grandes quantités d'oxygène dans l'atmosphère n'est pas vraiment un bon signe pour les organismes vivants (s'il y en avait) si l'on prend l'exemple de la Terre, comme l'a rappelé leur collègue de l'université de Lyon, Damien Loizeau.

    En effet, sur notre planète, tout a commencé sans cet élément chimiqueélément chimique. Produit par les cyanobactériescyanobactéries, il y a environ 2,3 milliards d'années, l'oxygène est donc arrivé bien après les premières formes de vie. Ce fut alors un véritable poison pour les archéesarchées méthanogènes présentes dans les océans et leur disparition catastrophique allait ensuite se répercuter sur le climatclimat et changer encore le visage de la Terre. « O2 est mauvais pour la vie, comme nous le savons, a commenté le chercheur, mais nous ne connaissons aussi que la vie pour être en mesure de créer de grandes quantités d'O2. »