Des chercheurs américains montrent que des cellules souches du placenta améliorent le fonctionnement du cœur chez des souris qui ont eu un infarctus du myocarde. Ces résultats prometteurs permettent d’imaginer de nouvelles thérapies cellulaires chez l’Homme.


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    Après un infarctus, le cœur humain peut difficilement régénérer les tissus lésés, d'où le risque de complications et de décès. C'est pourquoi des chercheurs aimeraient trouver un moyen de former de nouvelles cellules cardiaques - des cardiomyocytes - pour réparer un cœur lésé. Mais quelles cellules souches utiliser ?

    Ici, des chercheurs de l'Icahn School of Medicine at Mount Sinai (New York) se sont intéressés à des cellules souches placentaires fœtales. Celles-ci ont pour particularité de circuler dans l'organisme de la mère, ce qui permet de penser qu'elles ne provoquent pas de rejet. La même équipe avait montré précédemment qu'un mélange de cellules souches placentaires de souris pouvait aider le cœur de femelles gestantes à récupérer après une lésion cardiaque : ces cellules souches migraient jusqu'au cœur de la mère, sur le site de la lésion, et devenaient des cardiomyocytes.

    Le saviez-vous ?

    Le placenta est un organe d’origine fœtale qui permet les échanges entre la mère et le fœtus. À la naissance du bébé, il pèse environ 500 g.

    Dans cette nouvelle étude, l'équipe voulait déterminer quelles étaient précisément les cellules capables de régénérer des cellules cardiaques, dans le mélange de cellules souches placentaires. Parmi elles, les chercheurs se sont intéressés aux cellules Cdx2, les plus nombreuses, dont une part importante (40 %) assistait le cœur dans sa réparation.

    Les cellules Cdx-2 expriment la protéine Cdx-2 (CaudalCaudal-type homeobox-2), une protéine impliquée dans différents processus du développement embryonnaire. Les cellules Cdx2 sont multipotentes, ce qui signifie qu'elles sont capables de se différencier en plusieurs types de cellules. In vitroIn vitro, elles peuvent régénérer des cardiomyocytes qui se contractent spontanément et des cellules de vaisseaux sanguins.

    Le placenta est un organe en forme de disque qui permet les échanges nutritifs entre la mère et le fœtus. © sakurra, Fotolia
    Le placenta est un organe en forme de disque qui permet les échanges nutritifs entre la mère et le fœtus. © sakurra, Fotolia

    Vers une nouvelle thérapie avec des cellules Cdx-2

    Pour tester l'efficacité de ces cellules in vivoin vivo, les chercheurs ont provoqué des crises cardiaques chez des souris mâles. Puis, certains animaux ont reçu en intraveineuse des cellules Cdx2 provenant du placenta de souris en fin de gestationgestation, d'autres souris ont eu des cellules placentaires qui n'exprimaient pas la protéine Cdx2 et un groupe témoin a eu une solution saline. Les cellules Cdx-2 ont été marquées avec une protéine fluorescente (GFPGFP) afin de les suivre dans l'organisme receveur.

    Les chercheurs ont utilisé l'imagerie à résonancerésonance magnétique pour voir ce qui se passait. Chez les souris qui ont eu des cellules Cdx2, ils ont observé une régénération du tissu cardiaque : en trois mois, les cellules avaient migré jusqu'au site de la lésion, et formé de nouveaux vaisseaux sanguins et cardiomyocytes, ce qui permettait un meilleur fonctionnement cardiaque. Les autres souris montraient des signes d'insuffisance cardiaqueinsuffisance cardiaque, et pas de régénération. Les chercheurs ont aussi remarqué que les cellules Cdx2 avaient des protéines de cellules souches embryonnairescellules souches embryonnaires, mais aussi des protéines qui leur permettaient de se rendre sur le site de la lésion cardiaque, chose que les cellules embryonnaires ne font pas. Les cellules Cdx2 semblaient échapper au système immunitairesystème immunitaire qui ne le rejetait pas : pourtant, elles venaient d'un autre animal !

    Les placentas sont régulièrement jetés dans le monde entier

    Dans un communiqué, Hina Chaudhry, auteure de cette recherche, a expliqué : « Nous avons également pu isoler des cellules Cdx2 à partir de placentas humains à terme ; par conséquent, nous espérons maintenant pouvoir concevoir un meilleur traitement du cœur par les cellules souches humaines que ce que nous n'avons vu auparavant. »

    Or, si l'utilisation de cellules souches embryonnaires pose des problèmes éthiques, la question semble moins se poser pour les placentas, qui pourraient servir à fournir des cellules souches. « Les placentas sont régulièrement jetés dans le monde entier, ce qui en fait une source presque illimitée. »

    Ces résultats publiés dans la revue PNAS suggèrent également de nouveaux types de traitement pour régénérer d'autres organes : « Ces découvertes pourraient également ouvrir la voie à la thérapiethérapie régénérative d'autres organes que le cœur. »


    Cellules souches : un premier essai encourageant sur le cœur humain

    Article de Futura avec l'AFP Paris paru le 21 janvier 2015

    Il y a trois mois, une patiente souffrant d'insuffisance cardiaque avait bénéficié d'une greffegreffe réalisée à partir de cellules souches embryonnaires. Aujourd'hui, son état de santé s'est nettement amélioré. L'événement marque une grande avancée dans la thérapie cellulairethérapie cellulaire.

    Les cellules souches embryonnaires, dites pluripotentes, représentent un fort potentiel thérapeutique car elles sont capables de fabriquer toutes sortes de tissus (cardiaques, musculaires, etc). Des essais à partir de telles cellules embryonnaires avaient déjà eu lieu dans le monde pour corriger des pathologies de l'œil par exemple. Récemment, un tout premier essai a également été effectué pour pallier une insuffisance cardiaque.

    La greffe de ces cellules a été réalisée le 21 octobre 2014, chez une patiente âgée de 68 ans. Les cellules souches ont d'abord évolué en cellules cardiaques avant d'être greffées. L'opération ciblait la partie du cœur touchée par un infarctus et a été couplée par un pontagepontage coronarien. Elle a été menée par le professeur Philippe Menasché et son équipe du service de chirurgiechirurgie cardiovasculaire de l'hôpital européen Georges-Pompidou (AP-HPHP, Paris). La patiente souffrait d'insuffisance cardiaque sévère avec altération nette de sa fonction cardiaque à la suite d'un ancien infarctus. Elle n'était toutefois pas au stade ultime qui aurait relevé d'une greffe cardiaque ou d'un cœur artificiel.

    À présent, « la patiente va bien. Son état s'est nettement amélioré, sans qu'aucune complication n'ait été observée. Elle est rentrée chez elle et a repris une activité normale », a annoncé Philippe Menasché.


    Philippe Menasché (Paris Descartes-HEGP) est professeur de chirurgie cardiaque à l’hôpital européen Georges-Pompidou. Pionnier de la thérapie cellulaire dans l’insuffisance cardiaque expérimentale et clinique, il a conçu et réalisé les premières greffes de cellules souches musculaires dans le myocarde (muscle cardiaque) de l'Homme. © La santé demain, YouTube

    Incertitude sur l'effet des cellules souches

    Cette avancée prometteuse a été présentée aux 25e Journées européennes de la société française de cardiologie, à Paris. Les jeunes cellules cardiaques obtenues à partir des cellules souches embryonnaires ont été incorporées dans un gelgel qui a été posé sous forme de patch sur la zone du cœur de la patiente, rendu inerte par un ancien infarctus. À présent, cette partie du cœur bouge mais il serait prématuré de dire si l'amélioration provient de la greffe de cellules ou du pontage, selon le chirurgien. Philippe Menasché précise qu'il y a un an, un patient en bout de course avait également été traité. Il n'avait pas survécu à ses multiples pathologiespathologies, sans pour autant que le patch ne soit mis en cause.

    « Nous ne pensons pas que ces cellules vont vivre éternellement et fabriquer du tissu cardiaque, ajoute le Philippe Menasché. En revanche, il y a des arguments sérieux pour penser qu'elles sécrètent des substances qui peuvent induire une forme de réparation à partir du cœur lui-même . »